Une crèche en argile pour Mae Tan



Un mois et demi de pause dans une vie professionnelle de plus de 20 ans ! Un mois et demi pour aller voir mon filleul  le pado Antoine, dans sa mission à Maetan ! Un mois et demi pour effectuer la mission qu’il m’a confiée, à savoir réaliser en argile la crèche du centre et initier les élèves au modelage, tout un programme !  
Nous avons installé « l’atelier » un peu à l’écart, sous la terrasse de la maison de Kupopa et Kupomo, près des cochons, au milieu des poules et des coqs, à côté de la rivière et face aux montagnes birmanes ! Inimaginable avant d’être là ! « Prendre en main » la terre, construire le four primitif, faire quelques pièces pour tester la cuisson, premier objectif ! Pendant que mes premières productions - un éléphant, un pot à crayon, une silhouette, le buste d’une jeune fille et un porte savon – séchaient, j’ai fait préciser à Antoine la commande : une crèche de style karen avec des personnages en position assise d’une hauteur 30 cm. Après avoir photographié sous toutes les coutures Dapo en tenue traditionnelle, le modèle de Marie, je me suis lancée. Au début, les uns et les autres passaient sans s’arrêter, levant le pouce en criant à tue-tête bioutiful !  Puis, les jours passant et les différents personnages prenant corps, certains ont commencé à s’arrêter de loin, puis d’un peu plus près jusqu’à s’arrêter pour regarder vraiment. Les bioutiful se sont transformés en Tchana (super en karen) et c’est ainsi que nous nous sommes mutuellement apprivoisés… 
Pendant ce temps-là, mes premières productions avaient séché.  Avec l’aide de Kupopa, j’ai lancé le premier four. 24h plus tard, nous avons découvert le résultat. Ce n’était pas si mal mais cela nécessitait un peu de restauration. C’est à ce moment que j’ai découvert les talents de Kupopa ! Après lui avoir montré comment procéder, il s’est chargé de la restauration de l’éléphant et de fil en aiguille de la restauration de toutes les pièces puisqu’elles ont toutes subi des accidents avant, pendant et après la cuisson ! J’avais trouvé un formidable artisan, très doué de ses mains, avec qui j’ai aimé travailler et à qui j’ai confié la finition - cuisson, restauration et patine - des pièces que je n’ai pas pu cuire avant mon départ.
Une fois que la crèche a été suffisamment avancée, j’ai pu passer du temps avec les jeunes pour leur donner quelques rudiments de modelage. Je m’étais attachée à sculpter des choses différentes (objets, animaux, bas relief…) pour leur montrer ce qu’il était possible de faire. Malgré la barrière de la langue et avec l’aide de « Google translate », j’ai accompagné les élèves qui le voulaient à avoir cette expérience de la terre. Instinctivement, ceux qui se sont lancés se sont révélés plutôt doués, créatifs dans les sujets choisis et dans la façon de travailler la terre. Passée la phase de découverte, j’ai pu leur transmettre quelques éléments techniques. De mon poste d’observation que je croyais un peu à l’écart, j’ai fini par m’apercevoir au fil des jours que c’était un lieu de passage : entre sister Si qui allait sarcler la terre, les jeunes qui allaient nourrir les cochons, arroser le jardin potager ou encore ranger le bois, les catéchistes du père Camille ou du père Alain qui s’arrêtaient pour la nuit, des familles qui passaient, Pauline qui venait me tenir compagnie, Kupopa et sa famille bien sûr… sans compter le voisin qui rentrait chez lui et les amis du voisin qui allaient lui rendre visite…
J’ai rencontré des personnes simples, vraies et donc forcément attachantes. Ne pas pouvoir échanger a parfois été frustrant mais l’expérience de partage par le modelage a été une grande source de joie. Un mois après mon retour, alors que je termine de rédiger ce texte, Antoine m’envoie quelques nouvelles. Je trépigne de voir les photos car il paraît que « Kupopa a fait des merveilles, tu verras sur les photos et Supansa, Teiku et Woodi ont produit quelques oeuvres, encore un peu et les élèves dépasseront le maître... »

Tablev dodo (merci beaucoup)
Bénédicte